Base d’unité politique

Telle qu’amendée lors de l’Assemblée générale annuelle de juin 2016

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Les mots qui sont définis dans le lexique sont soulignés.

Table des matières

Vers la BUP.Préambule

  1. Les centres de femmes : leur orientation, leur projet féministe
    1. L’orientation féministe
    2. Une approche globale et non-compartimentée des problèmes QUI TOUCHENT les femmes
    3. Une approche d’éducation populaire autonome et féministe (ÉPAF)
    4. Une lutte contre les préjugés, qu’ils soient fondés sur le sexe, l’appartenance ethnique, l’orientation sexuelle, le statut social, etc.
    5. Le développement d’une solidarité concrète autour de problèmes communs ou de projets collectifs
  2. Les mandats des centres de femmes
    1. Les services
    2. Les activités éducatives
    3. L’action collective
  3. La vie associative
  4. Appartenance à L’R
  5. Adhésion à la base d’unité

 

Préambule

Les centres de femmes membres de L’R adhèrent à la Base d’unité politique (BUP) et à ses valeurs. La BUP est un outil de référence qui oriente les pratiques et les actions des centres de femmes et de toutes les femmes qui les composent pour l’atteinte du projet féministe d’une société juste et égalitaire.

Par toutes les femmes qui composent les centres, nous entendons :

  • bénévoles,
  • membres,
  • militantes,
  • participantes,
  • travailleuses rémunérées ou non-rémunérées.

Les centres de femmes du Québec forment un réseau important et significatif pour des milliers de femmes. Ils sont ouverts à toutes les femmes. Enracinés dans des communautés rurales ou urbaines, ils sont en mesure de bien connaître et de bien comprendre les besoins, problèmes et revendications des femmes.

Les centres savent que la situation politique, économique et sociale des femmes demeure problématique. Au Québec, comme partout ailleurs, les femmes sont peu présentes sur la scène politique. Pire encore, elles se retrouvent massivement dans les couches les plus pauvres de la société. Ce qui caractérise leur situation d’exclusion ou d’oppression, c’est, entre autres :

  • la violence sous toutes ses formes et ses effets;
  • la discrimination et l’iniquité en emploi qui se manifestent par la concentration des femmes dans certains secteurs d’emplois bien précis ou dans des emplois à statut précaire, sous-payés et sans avantages sociaux;
  • les problèmes d’accessibilité aux services de garde en termes de places disponibles, d’heures de service et de coûts;
  • la monoparentalité, passeport fréquent pour la pauvreté et l’exclusion sociale;
  • les problèmes relatifs aux pensions alimentaires;
  • l’exploitation sexiste du corps des femmes (pornographie, prostitution, etc.);
  • la surmédicalisation chez les femmes;
  • l’iniquité en matière de partage des responsabilités familiales incluant le soin des enfants et des proches.

La pauvreté qui touche les femmes est liée, entre autres, aux rôles féminins traditionnels, dont la responsabilité des enfants, et au fait qu’elles n’ont pas ou peu de revenus décents et ne possèdent pas ou peu de capital. La pauvreté porte atteinte à leur santé physique et mentale. De plus, elle est aggravée par les iniquité des gouvernements actuels qui préfèrent réduire les dépenses sociales plutôt que de s’attaquer résolument à la redistribution de la richesse et à la création d’emplois durables. Elle est liée également à leur absence et à la non-prise en compte de leur réalité dans les politiques de développement régional et local.

L’extrême difficulté pour de nombreuses femmes de participer à la vie politique et sociale et la précarité de leur situation économique se doublent, pour certaines d’entre elles, d’autres facteurs de discrimination systémique sur la base de leur handicap, de leur orientation sexuelle, de leur origine ethnique ou de leurs référents culturels, etc.

Cette forme de discrimination se manifeste par un ensemble d’attitudes, de comportements et de pratiques défavorables à l’endroit de groupes spécifiques et qui, bien que parfois inconscients, sont très présents notamment sur le marché du travail, dans les institutions scolaires, financières, de santé et de services sociaux. Cela crée des obstacles à la reconnaissance et l’insertion sociale, économique, politique et culturelle des femmes handicapées, de communautés culturelles, autochtones et de lesbiennes, etc., lesquelles voient leurs besoins et leurs droits non-reconnus.

L’isolement, la perte d’estime de soi, l’appauvrissement, la marginalisation marquent beaucoup de femmes parmi celles qui viennent frapper aux portes des centres. C’est pourquoi ceux-ci, tout en soutenant les femmes dans leur démarche d’autonomie, travaillent avec d’autres groupes de femmes et communautaires à changer les lois, les politiques, les institutions et les mentalités.

Les centres luttent donc sur plusieurs fronts à la fois :

  • changer les lois discriminatoires pour les femmes;
  • promouvoir l’équité salariale,
  • promouvoir la liberté de choix aux plans de la sexualité et de la reproduction;
  • dénoncer la violence sous toutes ses formes;
  • favoriser l’accès des femmes aux lieux de pouvoir;
  • promouvoir des rapports égalitaires entre les femmes et les hommes;
  • rappeler le rôle social et économique de l’État comme garant du bien-être de la société québécoise et de la redistribution de la richesse;
  • développer des ressources pour favoriser et soutenir l’autonomie socio-économique des femmes;
  • appuyer les revendications des femmes des communautés ethniques et autochtones;
  • être solidaires des femmes du monde qui luttent pour se sortir de la pauvreté et pour être respectées dans leur intégrité et leur dignité;
  • etc.
Les centres de femmes contribuent à définir une nouvelle société qui doit tenir compte des aspirations et des valeurs féministes. Ils interviennent autant sur des attitudes personnelles qu’au niveau politique. Ce faisant, ils remettent en question l’idéologie sexiste et l’organisation patriarcale (structures, institutions, fonctionnement de notre société) qui ont pour effet de maintenir les inégalités entre les hommes et les femmes.

1. LES CENTRES DE FEMMES : LEUR ORIENTATION, LEUR PROJET FÉMINISTE

Les centres de femmes sont des ressources qui offrent aux femmes un lieu d’appartenance et de transition, une alternative à leur isolement, un réseau d’éducation et d’action. Les centres sont polyvalents. Ils n’interviennent non pas sur une problématique en particulier mais sur l’ensemble des conditions de vie des femmes.

Ouverts à la diversité, les centres visent à être accessibles à toutes les femmes de leur milieu. Cependant, des centres peuvent choisir de répondre de façon prioritaire mais non exclusive à des femmes appartenant à des groupes discriminés : femmes handicapées, autochtones, de communautés ethniques, lesbiennes, etc.

Les centres sont mis sur pied et gérés par et pour des femmes exclusivement. Les femmes qui viennent dans les centres sont considérées comme des participantes à part entière plutôt que comme des usagères. Les travailleuses, rémunérées ou non, sont des femmes qui s’engagent auprès et avec d’autres femmes pour la réalisation du projet féministe. Les centres de femmes se caractérisent par :

1.1 – L’orientation féministe

Par cela, on entend :

  • favoriser une prise de conscience des stéréotypes sexistes;
  • favoriser une prise de conscience des causes sociopolitiques des problèmes rencontrés individuellement, ce qui a pour effet de déculpabiliser les femmes;
  • avoir confiance dans le potentiel de chaque femme, valoriser ses connaissances, ses expériences;
  • préciser le rôle des travailleuses de façon à développer des rapports égalitaires et équitables entre elles et les participantes;
  • soutenir les femmes dans des démarches d’autonomie leur permettant d’acquérir plus de pouvoir sur leur vie; respecter leur cheminement et leurs choix;
  • stimuler l’entraide, le soutien et la solidarité entre les femmes;
  • rechercher des solutions collectives aux besoins et intérêts des femmes;
  • susciter la participation des femmes à la vie démocratique et sociale.

1.2 – Une approche globale et non-compartimentée des problèmes qui touchent les femmes

Les centres refusent de découper la réalité des femmes en mille et une problématiques isolées les unes des autres. Cette approche favorise une intervention sur toutes les facettes de la vie des femmes misant sur ce qu’elles perçoivent individuellement et collectivement de leur situation et de leurs expériences.

1.3 – Une approche d’éducation populaire autonome et féministe (ÉPAF)

À travers les services, les activités éducatives, l’action collective et la vie associative, les centres favorisent des démarches d’apprentissage et de réflexion critique qui amènent les femmes à une prise de conscience individuelle et collective de leurs conditions de vie. Ces démarches leur donnent les moyens d’avoir plus de pouvoir sur leur quotidien, d’améliorer et de transformer les conditions affectives, sociales, économiques, politiques et culturelles dans lesquelles elles vivent. Conséquemment, les centres permettent aux femmes de se percevoir elles-mêmes comme agentes de changement et citoyennes actives qui participent à la vie démocratique et sociale de leur milieu.

1.4 – Une lutte contre les préjugés, qu’ils soient fondés sur le sexe, l’appartenance ethnique, l’orientation sexuelle, le statut social, etc.

Par leurs pratiques, les centres de femmes font la promotion d’attitudes, de comportements qui combattent le sexisme, l’exclusion et la discrimination.

1.5 – Le développement d’une solidarité concrète autour de problèmes communs ou de projets collectifs

Solidaires, les centres de femmes travaillent en concertation avec des groupes de femmes et autres groupes pour l’amélioration et la transformation des conditions de vie des femmes et des communautés.

2. LES MANDATS DES CENTRES DE FEMMES

Les centres se sont donné trois mandats : les services, les activités éducatives et l’action collective. Les services et activités sont offerts gratuitement ou à coûts minimes.

2.1 – Les services

Les services peuvent comprendre de l’aide individuelle et de groupe (écoute, accompagnement, référence, groupes d’entraide), les services d’une halte-garderie, d’un centre de documentation, etc. Ils viennent soutenir les femmes dans leur démarche d’autonomie.

2.1.1 – Dans les centres, les femmes sont des participantes à part entière et non des consommatrices de services.

2.1.2 – L’aide individuelle :

Dans les centres, on ne pose pas de diagnostic sur l’état de santé physique et mentale des femmes à partir de symptômes et de comportements, on n’ouvre pas de dossier et on n’offre pas de thérapie.

Les femmes en difficulté qui se présentent dans les centres sont accueillies par des travailleuses pouvant leur offrir écoute, support, référence et accompagnement, et ce, en toute confidentialité. Ce soutien individuel est offert au besoin et non dans le cadre d’une démarche formelle de suivi individuel. Cela implique que :

  • les femmes sont libres de se présenter, sans rendez-vous, de façon anonyme, au moment où elles en éprouvent le besoin;
  • les travailleuses n’ont pas à déterminer la nature du ou des problèmes qui touchent les femmes qui dévoilent leurs difficultés et malaises. Elles les supportent dans l’expression de leur vécu, dans l’affirmation de leurs besoins et désirs; elles les accompagnent dans la recherche de solutions aux problèmes qu’elles ont elles-mêmes identifiés.

Par conséquent, la nature de l’aide individuelle offerte dans les centres ne requiert aucunement l’ouverture de dossiers dans lesquels sont consignées des informations sur les femmes.

De plus, tout en offrant un soutien individuel aux femmes, les travailleuses les encouragent à participer aux activités du centre. En effet, les centres privilégient l’intervention de groupe parce qu’ils considèrent que c’est le meilleur moyen de briser l’isolement des femmes, de renforcer leur estime de soi et leur autonomie. En favorisant l’intégration des femmes dans des activités de groupes, les centres leur permettent d’échanger avec d’autres participantes vivant des situations problématiques semblables ou des réalités spécifiques. De cette mise en commun émerge souvent une solidarité qui favorise le soutien et l’entraide dont les femmes ont besoin pour réaliser des changements à l’intérieur de leur vie et pour améliorer collectivement leurs conditions de vie.

2.2 – Les activités éducatives

Par activités éducatives, on entend: les activités de sensibilisation, d’information, de conscientisation et de formation sur différentes thématiques; l’animation culturelle; la formation par l’action; la participation à la vie associative.

2.2.1 – L’approche privilégiée (ÉPAF) à travers l’ensemble des activités éducatives favorise la mise en commun et la valorisation des connaissances et de l’expérience que les femmes tirent de leur vécu. Les participantes sont les actrices de leur cheminement. Elles font des apprentissages qui leur servent à faire des choix et à identifier des solutions individuelles et collectives aux difficultés et problèmes qu’elles rencontrent.

2.2.2 – Les activités éducatives permettent aux femmes de renforcer leur estime d’elles-mêmes, leurs capacités de s’affirmer et d’exprimer leurs besoins dans le but de développer leur autonomie.

2.2.3 – Les activités éducatives visent l’action puisque c’est ensemble que les femmes pourront agir sur les causes sociopolitiques, économiques et culturelles des injustices qu’elles subissent.

2.2.4 – Les centres reflètent les réalités vécues par les femmes, quelle que soit leur appartenance sociale, leur origine ethnique, leurs référents culturels, ou leur orientation sexuelle, etc.

2.2.5 – Les centres s’engagent à sensibiliser les femmes aux réalités politiques, sociales et économiques qui influencent les conditions de vie des femmes d’ici et d’ailleurs dans le monde pour développer des liens de solidarité autour de problèmes communs.

2.2.6 – Les activités sont animées par des femmes qui partagent l’orientation féministe des centres de femmes.

2.3 – L’action collective

Par action collective, on entend l’ensemble des stratégies d’action visant à défendre et promouvoir les droits et intérêts des femmes dans une perspective de changement social. Les actions menées et appuyées par les centres peuvent se situer autant au plan local, régional, national que mondial.

2.3.1 – L’action collective dans les centres est un moyen pour atteindre les objectifs d’autonomie au plan individuel et collectif.

2.3.2 – Les actions sont diversifiées et partent des besoins des femmes. Celles-ci décident ensemble des objectifs, stratégies et des moyens.

2.3.3 – Les actions visent l’équité, l’égalité en droit pour les femmes, et la justice sociale.

2.3.4 – La participation à des actions collectives permet aux femmes d’être actives dans la communauté en tant que citoyennes critiques, revendicatrices et solidaires.

2.3.5 – Par l’action collective, les centres jouent un rôle actif dans les transformations sociales et politiques nécessaires pour contrer les injustices et la discrimination.

3. LA VIE ASSOCIATIVE

La vie associative des centres de femmes est démocratique. Elle favorise le partage du pouvoir entre toutes les femmes qui composent les centres. Ensemble, elles forment une équipe qui assure la mise en œuvre du projet féministe du centre.

La gestion collective mise sur la participation des femmes au processus démocratique : assemblée générale, conseil d’administration ou collective, comités de travail ou d’action, etc. Ces structures sont souples et accessibles à toutes afin de permettre aux femmes de s’y intégrer facilement.

Les centres recherchent de nouveaux modèles d’organisation et de gestion, conformes à leur orientation féministe et à leur projet éducatif en y intégrant des pratiques plus égalitaires.

3.1 – Toutes les femmes qui composent les centres peuvent s’impliquer dans les différentes structures décisionnelles du centre : assemblée générale, conseil d’administration ou collective, comités de travail ou d’action, etc. selon des modalités propres à chaque centre.

3.2 – Toutes les travailleuses rémunérées, incluant celles qui sont embauchées sur des projets, prennent part aux décisions qui concernent leur travail et délèguent au moins une représentante de leur choix au conseil d’administration ou à la collective.

3.3 – Les centres clarifient leurs rapports avec les travailleuses dans un contrat de travail. Ce contrat intègre les revendications féministes sur les conditions de travail. Les travailleuses participent à l’élaboration du contrat de travail qui précise l’ensemble des conditions de travail incluant :

  • les conditions d’embauche,
  • une description des tâches,
  • une politique de rémunération,
  • un processus d’évaluation et de congédiement,
  • le recours à la médiation en cas de conflit,
  • etc.

4. APPARTENANCE À L’R

Le Regroupement provincial des centres de femmes, appelé L’R, a été fondé en 1985. Les centres ont fixé à leur regroupement les objectifs suivants :

  • Développer et soutenir le réseau des centres de femmes;
  • Assurer la cohésion et le renouvellement des pratiques des centres en fonction de la BUP;
  • Appuyer les actions des groupes, des associations et des regroupements qui visent l’autonomie, l’égalité en droit et l’équité pour les femmes ainsi que la promotion de leurs intérêts, et la justice sociale;
  • Développer la concertation entre les centres de femmes;
  • Représenter les centres de femmes dans leurs revendications communes.

4.1 – Ces objectifs sont toujours d’actualité et les centres réaffirment l’importance d’un regroupement provincial dynamique et représentatif. Les centres veulent se concerter provincialement, développer leur solidarité et travailler ensemble à des changements en profondeur quant à l’amélioration des conditions de vie des femmes. En ce sens, L’R est un lieu essentiel de soutien aux centres et d’action sociopolitique.

4.2 – En conséquence de ce qui précède, les centres reconnaissent l’importance de s’impliquer au sein du Regroupement provincial, que ce soit à l’intérieur des tables régionales, des comités ou du comité de coordination (coco). Les centres participent aussi à l’assemblée générale annuelle de L’R et se prononcent sur les orientations et les perspectives de travail.

4.3 – Le coco de L’R a pour devoir de représenter les besoins, intérêts et opinions des centres. Pour ce faire, il les consulte sur toutes les questions jugées importantes et sur celles qui impliquent leur collaboration.

4.4 – Cependant, dans des questions d’actualité qui demandent une réaction rapide, l’exécutif de L’R peut prendre position avec un regard historique et un point de vue féministe. Pour élaborer un plan d’action à long terme, l’exécutif et le coco doivent consulter les centres.

5. ADHÉSION À LA BASE D’UNITÉ

Qu’est-ce qu’une base d’unité sinon un ensemble de valeurs qui cimentent les liens entre les centres de femmes? C’est le miroir dans lequel chaque centre se reconnaît, en même temps que la base idéologique d’un mouvement où le centre participe, se solidarise, se mobilise.

Notre BUP est dynamique. Son application peut évoluer au fil des ans. Cependant, chaque centre s’engage à en respecter les principes, dans toutes ses activités.

5.1 – Chaque centre membre de L’R adhère en principe et en pratique aux objectifs du Regroupement et à la BUP. Conséquemment, les règlements généraux de chaque centre sont le reflet de la BUP.